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ONU : la Géorgie épinglée sur les Droits des Minorités

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Lors de sa 91ᵉ session, le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies a entendu l’appel à l’aide des Arméniens de Géorgie et demande au gouvernement de prendre des mesures concrètes. Pour la première fois, une instance internationale condamne la politique de Tbilissi.

Le 15 octobre 2007, au palais Wilson à Genève, siège du Comité des droits de l’Homme de l’ONU, a eu lieu l’examen de l’État de Géorgie concernant les manquements au Pacte relatif aux droits civils et politiques et à la Charte des droits de l’Homme.

Car, si en Géorgie les minorités atteignent environ 17 % de la population, leur sort constitue la principale source de violation du Pacte. La situation des Arméniens, Azéris, Kurdes a été jugée préoccupante tant sur les plans économique, linguistique, religieux que politique. Discriminés socialement, souvent isolés, les régions où ils sont majoritaires sont lourdement carencées en dessertes routières, énergie, services sociaux et sanitaires. Parmi ces régions, la situation de celle de Samskhe-Djavakhéti peuplée à 55% d’Arméniens (95% dans les districts d’Akhalkalak et Ninosminda) a été longuement abordée et citée tout au long de l’examen de la Géorgie, comme l’illustration du traitement inacceptable des minorités.

Spoliation des biens arméniens

La présentation de la situation des minorités en Géorgie faite par les ONG et particulièrement par l’ONG YERKIR a permis de mettre en lumières de sérieux manquements au Pacte qui seront repris dans les préoccupations finales du Comité.

Le travail de cette ONG a débuté dès juillet 2007 par l’envoi aux experts du Comité des droits de l’Homme de plusieurs rapports. Ces rapports ont été rendus publics par le Comité sur son site Internet. Lors des sessions des 15 et 16 octobre à Genève, l’ONG YERKIR est intervenue plusieurs fois et a organisé un briefing, en partenariat avec la Fondation Armenia de Genève, pour les experts. Lors de ces interventions, le consultant de l’ONG Yerkir, Levon Isakhanyan, secrétaire du Conseil œcuménique de Géorgie, a pris la parole pour dénoncer le traitement arbitraire de l’État géorgien envers les confessions religieuses des minorités. Le problème de la non-restitution et de la spoliation des biens de l’Église arménienne par l’Église géorgienne a été mis en avant.

Lors du briefing, l’ONG Yerkir a fait intervenir un expert indépendant venu spécialement d’Australie, le Dr Fernand De Varennes, juriste et spécialiste du droit des langues minoritaires. Ce dernier a estimé qu’une politique ségrégationniste envers les langues minoritaires était un moyen d’exclusion des populations de Géorgie. Politique qui empêche la représentation des minorités au plan national, et encore plus préoccupant, dans l’administration des collectivités territoriales ou communales, dans les régions où elles sont majoritaires. L’exemple le plus frappant pour les experts a été que les directeurs d’écoles ne maîtrisant pas le géorgien ont tous été suspendus (plus de 120 dans la seule région du Djavakhk).

L’expert a aussi démontré que le problème de la langue était un facteur majeur d’émigration des Arméniens de Géorgie.

« Promouvoir l’intégration »

Les représentants du gouvernement géorgien ont été entendus par les membres du Comité, les 15 et 16 octobre, en séance plénière. La délégation composée de spécialistes de différents ministères, rompue à l’exercice de justification, s’est livrée à un exposé brillant dans la minimisation des infractions au Pacte. Lors d’un examen de plus de sept heures, ils ont dû s’expliquer sur la situation dans les prisons, la liberté d’expression, sur les personnes déplacées et réfugiées, le système judiciaire, la liberté de culte, ainsi que sur les droits des minorités.

Sur ce dernier point, les allégations de la délégation sont apparues comme parcellaires et les membres du Comité ont exigé davantage de précisions.

Le 29 octobre, le Comité des droits de l’Homme a rendu publiques ses observations finales sur la Géorgie. Les recommandations sont sans appel : la minorité arménienne de Géorgie fait l’objet de discriminations qui devront être supprimées par l’État géorgien, tant par la loi que dans la pratique. Par ses conclusions, le Comité manifeste sa préoccupation sur le statut privilégié de l’Église géorgienne et les discriminations que cette situation entraîne pour les autres confessions. Concernant les biens de l’Église arménienne confisqués, ils devront être restitués sans délai.

Reconnaissant les obstacles subis par la minorité arménienne et pour faire cesser la discrimination, le Comité préconise d’autoriser aux Arméniens notamment l’utilisation de leur propre langue avec les autorités et dans la gestion administrative des collectivités territoriales et communales dans leurs régions.

Le niveau de représentation politique des minorités, et en particulier celui des Arméniens, étant jugé particulièrement insuffisant, il est demandé à l’Etat géorgien de “prendre toutes les mesures afin de [leur] garantir une représentation et une participation politique” plus conséquente. Enfin, et plus généralement, il est recommandé de “faire disparaître les pratiques discriminatoires fondées sur la langue” et de “promouvoir l’intégration des minorités dans la société géorgienne”.

La première vérification des prescriptions onusiennes concernant les droits des Arméniens en Géorgie pourra être vérifiée très prochainement. En effet, le Comité souhaite que soit diffusé aux minorités, un résumé du rapport et des observations finales… Dans leur propre langue.

L’ONG Yerkir a initié et financé la réalisation d’un rapport en collaboration avec le Caucacus Media Institut sur les atteintes des droits de la minorité arménienne du Djavakhk.